San Francisco, Arkani Road, le Quartier Mutant (PV Thétis, Pyro)

Le dénouement de l'incident créé dans le bar fut bref. Attiré par les propos des leaders de la Confrérie et visiblement déçu par son amie, la jeune Thétis se décida à partir avec les deux hommes qu'elle venait de rencontrer. Cela n'était pas soit une mauvaise idée, car les deux hommes ne montraient aucune hostilité envers elle, et qui plus est, elle serait mieux protégée à leur côté que nulle part ailleurs.
La décision prise, Magneto quitta le bar, suivi par les deux jeunes gens. A peine s'étaient-ils engouffrés dans l'avenue qu'il leva sa main vers les cieux pour appeler un taxi. Dans une ville de cette taille, il ne fallait jamais attendre très longtemps. Quelques secondes s'écoulèrent avant qu'une berline jaune ne se stoppent devant les trois mutants. Magneto ouvra la portière, intimant sans ordre à ses compagnons d'y pénétrer, mouvement qu'il fit en dernier.


« Conduisez nous sur Arkani Road. », ordonna le leader de la Confrérie au chauffeur tout en lui tendant 50 dollars.

« Pas moyen qu'j'aille la bas mon gars. C'est trop craignos. », lui répondit l'homme tout en se retournant.

« Vous ne risquez rien avec nous. Il vous suffira de nous déposer aux abords de la rue. »


Magneto venait de glisser un nouveau pourboire au chauffeur et ce dernier se décida, bon gré mal gré, à mener ses passagers vers leur destination. Le voyage fut assez court, mais le silence régna dans le taxi. Magneto se doutait que Pyro devait brûler de questions à son encontre, tout comme Thétis qui devait se poser de nombreuses questions sur les deux hommes, sur le lieu où ils la menaient et sur les mutants en général. Pour les avoir accompagné comme cela, elle devait être une enfant curieuse, ce qui plaisait au Maître du magnétisme.

La berline stoppa sa route et les trois passagers s'en échappèrent. D'un simple coup d'œil, il semblait évident qu'il avait quitté les rues calmes de San Francisco pour un quartier plus agité. Le véhicule ne tarda pas à redémarrer sur les chapeaux de roue, son chauffeur semblant craindre cet endroit. Magneto commença à marcher, faisant un signe de la main vers ses accompagnateurs pour leur demander de prendre sa suite.


« Il n'y a pas de craintes à avoir ici malgré les apparences jeune demoiselle. Bien que cela semble surprenant, vous êtes ici chez vous... »


Que voulait dire Magneto par ces mots ? Les rues étaient calmes malgré l'heure et ce sentiment pesant n'avait finalement aucune raison d'être. Il marchait le long des maisons et des petites boutiques ne croisant que très peu de monde. Soudain le leader s'engouffra dans une petite allée ombragée qui menait à un parc. Là on pouvait y voir plusieurs individus accompagnant leurs enfants. Une enfant passa près d'eux en courant. Magneto la regarda passer en souriant. Il savait que son invitée serait surprise de voir son apparence. La jeune enfant était une mutante. Ses gènes semblaient s'être mêlés à ceux d'un félin aux vues de la formes de ses traits et de la longue queue qui ondulait joyeusement.


« Nous autres mutants connaissons le rejet de la part des humains... Ainsi nous nous sommes retrouvés dans l'obligation de nous ghettoïser. Nous voici dans la place mutante de San Francisco. Voilà pourquoi ce chauffeur avait peur de venir, beaucoup de rumeurs courent sur les mutants... »


Magneto s'était arrêté près d'un arbre avant de se retourner vers les deux jeunes gens, et plus particulièrement Thétis, avant d'entamer ses paroles de sa voix calme et grave, semblant peser chaque mot. Il offrit un sourire à la jeune femme, mais pas de ces sourires de charmeur qu'elle devait avoir l'habitude de croiser. Elle y voyait un sentiment plus profond, plus noble. Elle put ressentir que quelques soient ses choix, Magneto la considérait comme une des siennes, comme chacun des mutants de ce monde.

San Francisco était une ville vaste où les gens ne se regardaient pas, ne se parlaient pas, ne se touchaient pas... Bref une grande ville d'Amérique où chaque personne vivait une existence personnelle, bien à l'abri des autres, pensant ainsi se protéger de tous les dangers. C'était juste morne et froid, baigner dans une foule qui ne regarde que son propre chemin et qui se moque que vous soyez à ses côtés en lui tendant une main...
Thétis regardait ainsi les rues défiler, le minois halé caressant presque la vitre un peu sale du taxi dans lequel elle s'était engouffrée avec ses congénères mutant... Ses deux perles azurées se tournaient parfois sur John et Erik. Elle se ravi d'être assise aux côtés de celui que l'on nommait Pyro et profita de cet instant en silence. Elle pouvait sentir la peau incroyablement chaude du bellâtre contre la sienne et à peine bougeait-il que son bras affleurait le sien. Qui aurait pu croire que si peu de choses pourraient avoir tant d'effet sur elle ? Puisqu'elle avait déjà oublié l'incident du bar, sa frayeur et son trouble... Elle se souvint uniquement du contact de sa main lorsqu'il l'avait saisit par le bras. C'est aveuglément qu'elle l'avait suivit, se détachant de Sarah et de la main qui avait tenté de retenir la sienne, en vain...

A présent elle partait pour un tout autre horizon. Calme et sereine, elle n'appréhendait pas l'endroit de leur chute, ayant dès lors une confiance aveugle en ses nouveaux amis. Déjà naissait en elle une grande admiration pour Magneto. Il était maître de lui-même et il sembla qu'il usait de son pouvoir avec sagesse. Pas agressif le moins du monde, il avait tiré, avec intelligence, Thétis d'un mauvais pas et avait couvert ses bêtises. A travers la reconnaissance, elle s'en sentait désolée et vraiment bête. Elle les avait tous mi dans une délicate posture et leur avait déjà fait preuve de ses balourdises. Elle espéra intimement qu'ils ne lui en tiendraient pas rigueur.

Sans doute que Magneto eut craint d'effrayer la jeune fille car il s'évertua à la rassurer sur l'endroit dans lequel ils se rendaient. A cette annonce, Thétis lui sourire doucement et il put voir que la sécuriser était inutile. Elle était même impatiente d'arriver et découvrir cet endroit secret.
Lorsqu'elle descendit du véhicule, elle observa à droite puis à gauche et fut surprise de la rapidité avec laquelle le chauffeur s'était défilé. Pyro avait à peine eut le temps de refermer la portière.
Ils avancèrent dans un dédale de rue presque lugubre avant d'arriver devant un parc où nombre d'enfant jouaient, entourés de ce qui semblaient être leurs parents. Il n'y avait rien d'étrange dans cette scène mis à part qu'une fille-chat courait après un ballon, un bébé se changeait malicieusement en sable dans le bac pour échapper aux mains de ses parents et un autre était accroupi en train de plier un morceau de bois par la simple pensée. Ana demeura coite devant cette scène et inclina son minois en plissant doucement ses yeux dont l'éclat grandit magnifiquement.

Elle se remémora sa propre enfance et songea que sa mère aurait vraiment adoré cet endroit et n'aurait plus redouté de l'emmener se baigner avec elle. Voir des volutes d'eau voler et le corps d'une petite fille se liquéfier et perdre de sa solidité n'aurait pas étonné plus que ça.

Ana se tourna un instant vers Magneto et se remémora l'attitude craintive du taxi.

« Je comprends... Pour eux tout cela n'est pas normal... Ils ont si peur de ce qu'ils ne comprennent pas... »

Puis son regard se tourna de nouveau vers le parc des enfants et inspira profondément. Ce qu'elle voyait n'avait rien d'un ghetto, c'était le paradis.

La discussion s'était facilement entamé. Il était évident que parler de leur propre condition ainsi que de celles de leur semblables étaient pour le trio un sujet éminemment intéressant. Ainsi les deux jeunes gens avaient renchéri les propos de leur aîné qui les regardait en souriant. Ils avaient fait preuve d'une grande intelligence et d'une grande sagacité d'esprit pour venir comprendre la situation de cette place mutante en plein cœur de la ville.


« La peur... Elle a toujours guidé l'homme vers les chemins les plus sombres. Les grandes tragédies sont toutes issues de la peur. Aujourd'hui l'attention des peurs est concentrée sur nous et nos semblables. »


Le ton était toujours aussi calme et didactique, tel un professeur à ses élèves. Ana d'ailleurs, tout comme Pyro en son temps, pouvait bien voir les ressemblances entre Magneto et le Professeur X. Cependant, là où le télépathe inculquait une vision du monde, son vieil ami, comme il se considérait toujours malgré leur face-à-face, poussait ses disciples à se forger une opinion propre, à découvrir la réalité sur les mutants et leur condition.

Il reconnut bien Pyro à sa question sur les talents de leur jeune invitée. Cela intéressait bien évidemment également le leader de la Confrérie même s'il n'aurait pas été aussi direct, préférant que la mutante ne se dévoile. Mais cela leur ferait gagner du temps.
Toutefois, sans attendre la réponse d'Ana, il les invita à nouveau à le suivre. Le parc était relativement agité. De nombreux enfants jouaient accompagnés de parents, à l'image d'un parc classique. Mais ici, tout avait une notion dépassant la normalité. Certains enfants se déplaçaient à une grande vitesse, d'autres parvenaient à dévier la trajectoire du ballon de basket... Un monde mutant se tenait sur cette petite place.

Magnus arriva à hauteur d'un endroit qu'il appréciait, les tables d'échec. Il invita Ana à s'asseoir sur une chaise, et il se mit à sa droite, le manipulateur du feu prenant la place disponible face à lui. Il observa tour à tour les deux jeune gens. Ils étaient si différents et pourtant avait de nombreux points communs. Magneto appréciait les jeune gens vif d'esprit et curieux. Et en cet instant, il était particulièrement bien accompagné.


« Voilà une dizaine d'années que ce type de quartier ont vu le jour dans les grandes villes de ce monde. Les nôtres ont toujours inspiré la peur. Cela peut bien sur se comprendre, comme tu le relevais chère Ana. Nous disposons de pouvoir qui pourrait révolutionner ce monde, qui devrait même révolutionner ce monde afin de le rendre meilleur.
Au lieu d'accepter l'évolution qui pourrait guérir le cancer qui ronge cette planète, les humains nous repoussent et nous nous retrouvons parquer dans des quartiers coupe gorge, où le bien se trouve menacer par la folie de quelques uns.
Je rêve d'une nation permettant à mes semblables de simplement vivre en paix, dans le confort et la sécurité qu'il mérite. Mes jeunes amis, que penseriez vous d'une terre comme celle-ci ? »

Un oiseau de feu... La Donzelle eut un mouvement de sursaut et pressa ses points serrés contre son ventre. Sa réaction était comparable à celle d'un animal devant lequel on brandille une torche enflammée.
Partagée... Elle l'était entre la fascination de la beauté de l'instant mais autant apeurée de se bruler. Le feu est un élément qui l'avait toujours fait trembler et qu'elle avait toujours soigneusement évité et là, l'incarnation même de sa peur s'était matérialisé en John... Thétis eut un léger mouvement de recul et pressa ses lèvres l'une contre l'autre en baissant légèrement mais craintivement sa tête brune. Mal à l'aise les premiers instants, elle prit sur elle ensuite et reprit un léger sourire contraint sa silhouette aquiline reprenant consistance.

Elle n'eut pas le temps de répondre que déjà Magnéto les emmenaient autre part, les guidant à cet instant vers un ilot de tables d'échec. Pendant ces quelques pas derrière leur leader, la Donzelle se tourna vers John et lui sourie légèrement.

« C'est un don incroyable que tu as. Je comprends un peu mieux... »

… Un peu mieux pourquoi elle avait cette sensation étrange à ses côtés, sans oublier la lueur de ses yeux et la chaleur que son aura dégageait.
Elle tendit sa paume et c'est là que sa main se dématérialisa, ne devenant, jusqu'au milieu de l'avant bras, qu'une masse translucide bleuâtre. De l'eau pure. De sa menotte liquide s'extirpa une partie de l'eau qui la formait jusqu'alors pour former une boule aqueuse parfaite qui roulait sur elle-même.

« On m'appelle aussi Thétis... »

Si les cours d'histoire de son collège en Angleterre l'avaient ennuyé, elle avait su grandement apprécier le passage sur la mythologie, en particulier celle de la Grèce.

Elle se souvint des mots de son professeur lors d'une pluvieuse matinée d'octobre...

« Flashback » : « Thétys est une déesse marine archaïque, fille du Ciel et de la Terre, représentant la fécondité marine (...) »

Il avait suffit de quelques mots pour allumer son attention, chose assez rare. Elle avait dévoré les livres à son sujet et s'était amusé à d'identifier à cette Mère des océans. Il n'y avait aucune prétention dans cette appellation car elle ne se prenait pas pour un être à l'essence divine, mais la musicalité de la dite dénomination lui plu, alors que le rôle protecteur et maternel, elle l'avait déjà en elle et depuis toujours.

Son bras reprit une forme normale, la sphère bleue se résorbant dans son être, celui-ci l'assimilant totalement, jusqu'à la dernière goûte. Arrivée devant la table d'échec, Thétis prit place et Magneto à ses côtés. Elle leva son regard azure sur ce dernier tout en l'écoutant parler d'une terre paisible, d'une nation mutant. Le regard d'Ana passait de Pyro à Magnus.

« Ce serait très bien oui... Mais... Je trouve dommage de nous séparer des non-mutants. Ce sont nos parents après tout. N'y aurait-il pas un moyen de nous faire accepter ? Peut-être devrions nous leur laisser du temps. Voir des gens avec des pouvoirs comme les notre doit forcément effrayer car après tout, tous les mutants ne sont pas aussi pacifiques. Certains veulent même exterminer les Hommes... »

Elle leva un peu ses épaules étroites et entremêla ses doigts en observant leurs réactions respectives, espérant partager le même point de vue, ignorant que ce n'était pas vraiment le cas.

Les trois mutants étaient désormais installés autour d'une petite tablée servant ordinairement pour les parties d'échec plus ou moins acharnés. L'aîné les avait mené ici, pour lui les échecs représentaient à la fois l'avenir par la stratégie, mais aussi un lieu de repos. Un homme passionné par ce jeu se rapprochait de la vérité sur la vie. Tel était le point de vue de Magneto.

Cependant l'heure n'était pas aux échecs mais à la discussion, et elle était animée. Pyro avait mené la jeune femme à se dévoiler. Magnus avait déjà un léger doute sur son pouvoir après les évènements dans le café, mais il n'avait aucune certitude. Désormais, il savait. Et il sourit en repensant au nom dont la demoiselle s'était affublé. Thétis, fille du ciel et de la terre qui accueillait le soleil lorsqu'il avait fini sa course folle. Mais Thétis pouvait également être associé à la néréide mère d'Achille, à la fois proche des dieux et des hommes par son fils. Il retrouva d'ailleurs le concept de la déesse mais aussi de la nymphe marine dans les paroles de la jeune mutante. Cela ne manqua pas de le faire sourire. Les mots qui s'échappaient des lèvres de Thétis n'était que paix et bonté. Mais il ne retrouvait pas non plus l'endoctrinement des X-men et de Xavier. Non, dans ce cas présent il voyait une personne généreuse, mais encore éprise de doutes.
Il comprenait ces doutes. Il ne partageait pas les points de vue pacifiste, ou plutôt attentiste. Attendre que l'humanité accepte les mutants correspond à se résoudre à la mort de certains des leurs, à accepter de se cacher et de se soumettre à la domination d'êtres inférieurs, qui n'agissent que par le rejet et la violence de ce qu'ils ne peuvent maîtriser.


« Thétis... voilà un bien joli nom chargé d'une très longue histoire. Mais je dois avouer qu'il est particulièrement bien choisi à ton endroit. Tu as un don magnifique ma jeune amie. Puisse-tu en faire un bon usage. »


Magneto avait volontairement éclipsé la conversation originale. Il était revenu à la jeune femme qui lui faisait face afin d'alléger le flot de paroles, particulièrement sérieuse qu'ils échangeaient jusqu'alors.
Mais il savait qu'il ne devait pas faire patienter la curiosité de la jeune femme. Il appréciait ce trait de caractère, surtout lorsque la répartie étaient aussi affutée sans se montrer impérieuse. Cela amenait au dialogue, un peu comme il l'avait connu autrefois avec Charles, son vieil ami, même si les deux hommes avaient des visions bien plus opposés.


« Depuis combien de temps les mutants sont ils apparus ? Voilà bien longtemps, et nous sommes de plus nombreux. La race mutante est aussi cosmopolite que la race humaine. Avec ces utopistes, ces réalistes, ces pacifistes, ces maléfiques. Je pense que tu connais mon passé et je ne vais pas m'étendre sur mes actes. S'ils furent parfois jugé mauvais, ils n'ont jamais eu pour but la nuisance sans desseins. Seul le sort des miens m'inquiète.... »


Le maître du magnétisme se tue un instant, observant ses vis-à-vis. Il parlait d'une voie particulièrement calme et son charisme naturel poussait quiconque à l'écouter, d'autant plus qu'en cet instant le dialogue semblait prendre une autre tournure.


« Je comprends ton point de vue Thétis. Il est marqué par l'amour, la compassion. Des sentiments bien nobles, à l'image de ton désir d'une mixité entre les deux races. L'humanité a sa place en ce monde. Mais elle n'est pas disposée à nous laisser la notre. C'est en cet endroit que le bât blesse. Probablement avec le temps cela changera t'il. Mais je pense que cela passe par l'émancipation de la culture mutante, libre et visible aux yeux du monde. En restant caché comme cela se passe aujourd'hui, on donne du crédit à ceux qui voient en nous le danger et cela ne peut engendrer que la violence. Attendre sans agir, en laissant certains des nôtres dans la peur, n'est il pas une forme de lâcheté ? »


Magneto avait laissé cette interrogation en suspend, attendant la réponse de la jeune mutante. Il venait de montrer également à Pyro l'évolution de son discours depuis qu'il avait connu une vie d'humain normal. Bien sur son langage était policé, il jouait sur les mots pour montrer une partie de son ambition, la libération de la condition mutante, objectif qu'il avait toujours eu. Mais il ne parlait bien évidemment pas des moyens pour mener ce projet à sa réalisation.

Magneto... Un nom qui inspirait la peur chez les êtres humains car il était force et révolte, indignation et violence. Les Hommes sont aisément corruptibles, sans qu'on les y pousse, car trop impurs, ils cherchent toujours à posséder ce qu'ils n'ont pas. C'était infiniment triste parce que cela faisait d'eux une espèce condamnée par leur nature, celle là même qui leur avait permis de traverser les siècles et d'évoluer. N'y avait-il donc pas d'avenir pour ces gens ?

Et les mutants ? Qu'étaient-ils ? Sinon de simples humains à qui on avait offert un cadeau. Étaient-ils une race différente ? Ou bien seulement une chance pour l'Homme de réparer ses erreurs... Thétis avait peur des Hommes autant qu'elle les plaignait. Par peur ils étaient capables des pires atrocités. Elle les empêchait de voir quelle chance se profilait devant eux : une autre perspective de l'avenir. Mais en fait, elle craignait bien que le mal se fasse plus pernicieux. N'était-ce pas tout simplement de la jalousie ? On avait doté certains êtres de dons véritablement fabuleux qui leur permettaient d'accomplir des miracles. Et les autres ne pouvaient que rester planter là, à regarder sans pouvoir toucher, effleurer des doigts toute cette puissance. C'était encore là leur avidité... Toujours à en vouloir plus et à envier ce qu'ils ne possédaient pas.

Ana avait souvent réfléchi à tout cela et à cet instant, son regard se brouilla car Magneto avait raison. Certaines personnes vivaient dans la terreur parce qu'ils possédaient un don. Ils étaient soit châtiés, soit persécutés et tous ne possédaient pas de pouvoirs capables de leur offrir une défense. Elle abaissa son minois en observant les pièces du jeu d'échec, bien disposées sur le damier aux dalles blanches et noires...

« Pourquoi le Professeur Xavier ne pense pas comme vous ? Après tout, créer une nation mutant c'est un peu comme son école non ? Mais en bien plus vaste...»

Et finalement, cette idée n'était pas si mauvaise, elle était même séduisante. Peut-être que sa mère l'aurait apprécié... Savoir que sa fille était en sécurité dans une ville ou chaque personne n'avait plus de préjugés ni de peur contre elle.

Une œillade azurée se posa sur Pyro. Rien qu'en observant ses yeux il avait l'air si... déterminé... implacable... presque inquiétant... Et elle... si opposée... Naïve, frêle, totalement ordinaire. En cet instant, elle aurait aimé avoir une personnalité semblable, moins malléable et plus combative. Peut-être la méprisait-il pour cette faiblesse. Elle pinça ses lèvres et ferma ses yeux. L'idée même d'être méprisée par les siens lui fut trop insupportable et elle voulu se gifler. Elle avait passé des années à s'en vouloir d'être si différente et outre les humains, elle s'était flagellée l'âme dans une torpeur solitaire, s'évanouissant dans un chagrin inouï qui ne prit fin qu'il y a encore peu de temps, grâce au Professeur. Elle s'était promit de changer. Plus jamais elle ne s'en voudrait d'avoir un pouvoir.

« J'aurais aimé sauver des vies... A quoi pourrait me servir mon pouvoir si ce n'était pas à ça ? »

Elle avait pensé tout haut et sa voix éraillée trahit son émotion. Finalement, s'enfermer dans un monde mutant c'était peut-être du gâchi ? Avec tous les pouvoirs, ils pourraient peut-être sauver les gens et être ainsi mieux considérés ? Elle ne savait vraiment plus quoi penser. C'était à s'en arracher les cheveux. Elle émit un léger soupir en gardant sa tête brune baissée, ses filins noirs corbeau ruisselant de part et d'autre de son faciès gracile, la couvrant comme un voile de soie.

( HJ : désolée, message court et en plus j'ai mis du temps à répondre )

Pyro ne pipait mot pour le moment, laissant entièrement la parole à son mentor. Ce dernier parlait et expliquait si bien... Le jeune manipulateur de feu avait tant de questions à lui poser. Après tout il avait disparu si longtemps! Qu'avait-il vécu ? Qu'avait-il vu, appris ?

Les iris dorés du jeune mutant fixait un garçon d'une dizaine d'années aux cheveux bleus sans s'en rendre compte. Il était absorbé par les paroles de Magneto. Il avait changé. Sa détermination semblait plus féroce, son regard plus précis, ses décisions déjà prises. Il émanait de lui une confiance absolue. Quoi que l'on dise, il était plus que sûr de lui. Pyro était fière d'être de son côté, d'être presque ami avec cette personne si pleine de sagesse et de pouvoirs. Son regard se détourna, et se reporta une fois de plus sur la belle Thétis. Elle aussi buvait les paroles du leader de la confrérie. Pourraient-ils la changer de côté ? Elle semblait si frêle, si naïve... Jamais elle ne voudrait se battre contre d'autres êtres vivants... Mais elle semblait pourtant tellement en accord avec leurs idées... Pyro ne savait que penser de cette jeune mutante et de ses idées précises. Tout ce qu'il pouvait savoir c'était qu'elle était d'une beauté incroyable.

Le jeune Allerdyce, réfléchissait également. Ses motivations, elles, étaient parfaitement claires. Il n'était plus de l'avis de Charles Xavier depuis longtemps. Le pacifisme ne sert à rien dans les situations comme la leur... D'un mouvement machinal, Pyro avait tiré son briquet Zippo de la poche de son jean et s'amusait à l'ouvrir et le refermer, créant une flamme lorsque son pouce s'avancer sur la petite roulette. Un simple tic machinal.

Il sortit des abysses de son esprit lorsque Thétis leur expliqua : « J'aurais aimé sauver des vies... A quoi pourrait me servir mon pouvoir si ce n'était pas à ça ? ».

- Nous sommes des personnes Thétis, pas des super-héros. Tu penses que les humains, dans leur vie de tous les jours, songent à sauver des vies eux ? A l'exception des médecins ? Bien sûr que non, ils ne songent qu'à leur petite personne, à faire la guerre à tous ceux qui seraient une menace pour eux. A nous faire la guerre. Nous sommes qu'en position de défense, pas d'attaque, nous les mutants. Nos pouvoirs sont le fruit de l'évolution génétique, pas d'un don divin qui nous oblige à sauver notre prochain. Evidement, nous devons être solidaires entre mutants, bien que ce ne soit pas toujours le cas... Mais sauver les autres non. Nous devons vivre notre vie avec ce que la nature nous a donné en plus, c'est tout. Pense d'abord à toi, à tes idées et à tes convictions avant de songer aux autres. C'est un conseil. Jamais les gens te seront reconnaissants même si tu leur sauve la vie une bonne centaine de fois... Ils sont hypocrites et n'hésiteront pas à poignarder une mutante aussi belle que toi dans ton dos...

Sauver des vies... Et puis quoi encore ? Déjà il faut apprendre à sauver sa propre vie, ce qui est déjà bien loin d'être facile. Il lança un regard d'excuse à son interlocutrice de s'être montré si virulent puis observa le visage de son mentor. S'était-il trop enflammé soudainement ?

La discussion entre les trois mutants se poursuivaient. Chacun d'eux étaient bien différents, ainsi les échanges qu'ils offraient à leurs interlocuteurs ne faisaient qu'élever le niveau du débat. Le calme Magneto à la détermination de fer, l'impulsif Pyro et son engouement de feu et enfin la douce Thétis et sa volonté paisible se laissaient à confronter des points de vue qui, en certain point, se rejoignaient. C'est de cette façon que la conviction de Thétis fut ébranler, ou plutôt convaincu par les termes du leader de la Confrérie. Bien évidemment il était évident que la cause mutante n'était pas une affaire de bien et de mal. Les mutants, à l'image de l'humanité étaient des êtres offrant tout un panel d'émotion, une civilisation à part entière se mêlant aux autres. Pour Erik Lehnsherr, la voie mutante offrait un parallèle avec la voie juive aux prémices du vingtième siècle, c'est-à-dire celle d'un peuple sans nation et se confondant dans chaque nationalité. Et pourtant ce peuple avait une identité propre. La création d'Israël n'avait pas été une totale réussite, mais au moins avait elle permis à ce peuple de disposer d'un territoire. Voilà ce que le Maître du magnétisme voulait offrir aux siens. Mais le monde était il prêt à accepter une telle chose ?

Pyro l'impulsif se mit à réagir promptement aux propos de l'aqueuse Thétis. Elle souhaitait sauver des vies. Cela représentait un bien noble but. Mais tout à son propre combat, celui qui avait renoncé au nom de John Allerdyce ne pouvait l'accepter. Il montrait une forme d'égoïsme bien propre à sa jeunesse. Sauver des vies par les pouvoirs de la mutation était pour lui une hérésie. Se confondant avec la thèse de son leader, il était en état de guerre. Il avait par ailleurs poursuivi la lutte, effectuant divers actes de terrorisme. Cela ne s'arrêterait par ailleurs sûrement pas.
Cependant, Magneto préféra ne pas relever les propos de son disciple. Du moins pas pour l'instant. Thétis avait soulevé un point assez intéressant en amenant au cœur de ses propos celui qui était le meilleur ennemi du leader de la Confrérie, Charles Xavier. Magneto avait souri en entendant le nom de ce vieil ami car malgré les luttes qui les avaient opposés, il avait toujours un grand respect pour cet homme qui, selon ses convictions, faisait avancer la cause mutante.


Mon point de vue n'est pas si éloigné de celui de Charles. Autrefois nous étions de très bons amis. Mais nos divergences nous ont fait voyagé sur des chemins différents, et non pas opposés comme beaucoup voudraient bien le croire. Je te rejoins, une nation mutante s'approcherait, en terme conceptuel de l'académie fondé par Charles. Mais un tel état nation ne pourrait passer inaperçu. Et le monde n'est pas totalement prêt à voir la naissance d'une telle entité. Charles pense en premier lieu à l'humanité avant de penser au mutant. Il veut que la première soit prête à nous accueillir. En ce sens il est utopiste. L'être humain n'a jamais été très doué pour accepter ce qui lui était différent. Ils parviennent déjà à créer des choses comme le racisme au sein de leur propre race...


Il se tut un instant. Il ignorait si la teneur de ses propos choquerait ou non la jeune femme. Mais s'il souhaitait la convaincre, il ne pouvait se permettre une manipulation par le mensonge. Il devait au contraire la confronter à la réalité.
Lentement, son regard se tourna vers Pyro. Il lui offrit un sourire que le jeune homme comprit. Il savait que le leader mutant n'était pas homme à sourire inutilement et s'il lui offrait un tel présent, c'est qu'il approuvait les paroles qu'il avait échangé avec la jeune femme.


Pyro a cerné un problème de l'humanité et de la cause mutante. Au final nous ne sommes pas si différents, les mutants ne sont que des hommes ayant évolués. Cela nous confère probablement, et c'est en ce point que je m'éloigne des propos de mon jeune disciple, une forme de responsabilité. Je partage ce point avec Charles. En tant qu'être supérieur, nous avons un devoir. C'est sur ce point que je ne partage pas l'avis de mon vieil ami. Pour lui nous devons protéger l'humanité jusqu'à ce qu'elle nous accepte. De mon côté je ne souhaite que la liberté pour les miens. Ce don qu'est la mutation ne doit pas être un fardeau, et malheureusement c'est bien trop souvent le cas.


Le mutant retrouva le silence. Son regard, au départ posé sur Pyro avait lentement glissé vers la jeune femme. Il ne souriait plus et affichait une mine grave et importante qui ne faisait qu'augmenter la puissance de ses propos déjà servi par une voix grave qui faisait qu'il était immédiatement écouté.

Depuis sa naissance, Anasuya avait été entourée d'amour et chaque chose dans sa vie avait été guidé par cette main directrice. Une sorte de fraternité s'était installer dans ses souffles, une vision du monde un peu idyllique, comme une enfant, qui pourtant avait souffert de la colère de l'humanité. Il a de nombreuses choses qu'elle avait apprise sur les hommes. La colère, la jalousie, l'amour de l'argent et du pouvoir... Elle s'était insurgé, révolté parfois contre eux. N'avait-elle pas un jour fait couler un baleinier par pur emportement ? Elle les avait haït, pourtant elle n'avait pas détruit leur canot de sauvetage. Elle s'était contenté de donner à la mer agitée un peu plus de force et de rage. Elle ne s'était pas occupée de la vie que l'embarcation portait et tentait de protéger. Avaient-ils survécu ? Elle ne voulait pas le savoir, ne pas y penser, ne pas s'en souvenir... Par pure lâcheté certes... Une véritable tâche d'encre sur son âme si immaculée. Elle espérait juste qu'elle ne s'agrandirait pas.

« Nous ne sommes pas des héros... » Pensa-t-elle.

Mais elle ne voulait pas ressembler à cet amas d'ire, elle ne voulait pas détourner les yeux et pourtant elle ne pourrait pas sauver le monde à elle seule.
Elle releva ses prunelles sur Pyro et entrouvrit ses lèvres. Sa colère était presque palpable. Il avait une si mauvaise opinion de l'humain qu'elle avait l'impression de se voir dans une glace le jour où elle brisa les os à ce bateau et à ses passagers. Aucune pitié, pas une once de compassion. Qu'ils ne voient plus la lumière, qu'ils tremblent devant elle, qu'ils pleurent leurs regrets...
Ana eut envi de poser sa main légère sur la joue du blondin et de faire fuir toute sa haine... Mais elle abaissa son regard avant de se trahir pour le poser sur les mains usées de Magneto.

L'Etre humain cherche des prétextes pour se détester... C'était vrai. Cela était visible à travers des mots comme le racisme, le sexisme ou la haine pure et simple envers le premier venu. Sauf que dans ce cas précis, les êtres rejetés en question avaient du pouvoir, avaient de la force et n'acceptaient pas de se laisser flouer. Ils revendiquaient leurs différences.

« Est-ce que je dois choisir un camp ? »

Elle avait pensé tout haut et dans sa voix sonnait comme un son de tragédie. Elle avait toujours eu cette impression d'appartenir au monde entier et pourtant de ne faire pas partie de lui. C'était une étrange sensation qu'elle avait éprouvé depuis toujours malgré tout ses efforts pour essayer de l'intégrer.

Choisir un camp... C'était peut-être là sa seule alternative. La neutralité était un luxe qu'elle ne pouvait manifestement pas se payer. Un frisson traversa son échine, soulevant le grain doré de sa peau fine. C'était l'heure du choix et la jeune Thétis inspira profondément, voilant ses iris azurins de leur paupière avant de relever son regard sur Pyro.

« Comptes-tu faire une guerre ou instaurer la paix ? »

Le jeune homme semblait parfois si calme, et un instant après, il bouillait, prêt à exploser et à réduire le monde en cendre. Lorsqu'il s'emportait, il l'effrayait un peu. Pour elle, il n'y avait de peur plus grande que celle de se brûler.