Famille Recomposée [Diablo+Mystique?]

Une fois de plus, Malicia avait décidé de fuir l'Institut. Pour quelques heures, seulement, elle n'avait pas prit son sac de randonnée. Assise sur un banc d'un grand parc boisé, elle buvait un café et observait la foule. Il faisait assez frais pour justifier qu'elle soit aussi couverte : bonnet blanc, pull rouge en laine au col roulé si large qu'on voyait le t-shirt blanc à capuche en dessous, jean noir et hautes bottes de cuir. Elle s'était même autorisée des mitaines plutôt que des gants.

Et qui dit parc dit rendez-vous amoureux et son lot de couples détestables. Cela faisait quelques jours qu'elle était obsédée par Rémy Le Beau, le bien nommé. Ces yeux rouges hantaient ses rêves les fous, et elle imaginait des choses qu'elle ne pouvait, justement, qu'imaginer. Elle vida son gobelet d'un trait, et aperçut un de ces maudits couples la pointer du doigt, et un agent de police s'approcher. Allons bon, même pas moyen d'avoir la paix ! Elle se leva et partit d'un bon pas, assez pour le semer. Elle décida de déjà rentrer à l'Institut, de s'enfermer dans la Salle des Dangers quelques heures pour évacuer sa frustration.

Elle passa par les bois et s'arrêta à proximité d'une clairière, pour malgré tout être sûre de ne pas être suivie : avec un peu de chance, l'agent aurait trouvé sa trace, et elle pourrait pourrait déjà se changer les idées par un coup de poing bien placé.

Malicia attendait, le cœur battant, de voir le policier apparaître derrière n'importe quel arbre. Depuis l'une des dernières opérations de Magnéto, elle avait une espèce de néon rose fluo au-dessus de la tête qui clignotait "Je suis Malicia, la méchante mutante qui a failli tous vous transformer en mutants". Elle avait essayé de se teindre les cheveux, deux fois, mais rien à faire pour cacher ses mèches blanches si caractéristiques. Et il n'était même pas question d'essayer de faire entendre raison à ces Homo inferior : elle était mutante, donc à abattre. Elle aurait pu continuer à fuir, dans les bois, elle savait faire disparaître ses traces assez facilement, et puis, l'Institut n'était pas si loin.

Mais elle en avait assez de s'aplatir devant les gens "normaux". Elle avait tiré sur ses mitaines pour recouvrir ses doigts, et son poing serré attendait qu'apparaisse le visage de l'homme en uniforme. Mais à la place, c'est une voix tremblante qui a fit sursauter. Malicia fit volte face, surprise. Elle se détendit face à la vieille femme inoffensive. Avait-elle réellement pris une barre chocolatée en partant ? Elle fouilla dans la poche ventrale de son pull, y devina tout son bazar habituel : clefs, téléphone portable, cartes de crédit, et même papiers d'identité. Malicia avait certaines faiblesses - en dehors d'un certain Cajun qui lui faisait tourner la tête - et la barre qu'agitait la vieille femme était la marque qu'elle préférait, alors que Malicia n'était pas particulièrement friande de chocolat.

- Et bien, merci beaucoup...

La jeune femme prit soin de recouvrir chacun de ses doigts avant de tendre la main et saisir la friandise. Elle adressa un sourire à cette grand mère qui devait être bien solitaire pour l'avoir suivie, dans l'unique but de lui rende quelque chose qu'elle n'avait, au final, pas perdu.

- Je peux peut-être faire quelque chose pour vous ?

Malicia mit le chocolat dans sa poche, et un détail la fit soudain tiquer. Comment une grand mère, vieille, fragile, lente, et qui a perdu quelques neurones avec l'âge, a pu la rattraper, alors que le policier, jeune (enfin...) et entraîné à poursuivre les criminels, n'avait même pas retrouvé sa trace ? Quand bien même il avait une piste, comment une mamie aurait pu le doubler ? Malicia remit correctement ses mitaines : elle n'aimait pas utiliser sa Malédiction comme ça, encore moins sur des personnes âgées. Il faut croire qu'aller à l'Institut lui avait donné une certaine morale. Mais là, pas le temps de l'appeler pour qu'elle rapplique, la morale. Sur la défensive, Malicia fit un pas en arrière :

- Et, vous vous appelez ... ?

Les personnes à connaître le véritable prénom de Malicia étaient rares : celles autorisées à l'utiliser l'étaient davantage. En réalité, seules Mystique et Destinée avaient ce privilège. Entendre la vieille femme l'utiliser la força à être sur la défensive : plus aucun doute n'était possible sur son identité, et chacune de ses répliques portait la marque de sa mère adoptive.

Lorsqu'à 13 ans, Malicia fuit le cocon familial, elle fut recueillie par deux mutantes : Destinée, qui s'occupa de son éducation, et Mystique, qui lui apprit... Disons, tout ce qui pouvait être réellement utile selon son point de vue : combat, défense, et surtout, la règle n° 1 : ne jamais faire confiance à qui que ce soit. Elle s'était montrée une élève attentive et obéissante, mais toute cette éducation avait commencé à s'effriter quand Jean Grey et Cyclope avaient combiné leurs pouvoir pour l'aider, elle, alors qu'ils ne la connaissaient pas et qu'elle avait laissé Mystique entrer dans leur précieux Institut. Quelque part, Malicia souhaitait faire confiance aux gens, et c'est ce qui l'avait décidée à quitter la Confrérie.

Mais au fond, devenir étudiante à l'Institut Xavier la privait de la présence rassurante de Mystique. Car il fallait l'avouer : la métamorphe était puissante, et parfois prise de crise de mère poule. Seuls les ordres de Magnéto prévalaient, et c'est pour ça qu'il avait pu utiliser Malicia pour son plan. Lorsque Mystique reprit sa forme normale aussi vite, Malicia sut qu'elles n'auraient pas à se battre, et si elle gardait ses distances, elle réussit à se détendre. Au moins un peu.

- Je suis heureuse de te revoir, moi aussi, mère.

Et cette façon de l'appeler prouvait le profond respect qu'elle vouait à Mystique, peu importait qu'elles soient dans des camps opposés aux frictions fréquentes. Après un dernier regard vers les bois, Malicia prit la liberté de s'asseoir sur une souche. Elle ne savait pas trop quoi raconter à sa mère, à vrai dire.

- Je mange bien parce qu'il y a une mutante - Maw, je crois - qui aime cuisiner, et elle se débrouille plutôt bien, il faut l'avouer. Et aujourd'hui, je sèche les cours parce que... *soupir* Gambit est un prof pas vraiment intéressant.

Ça puait le mensonge à plein nez - même si elle séchait vraiment un cours du mutant. Elle aurait pu prétexter autre chose, mais c'est tout ce qui lui était venu à l'esprit. Et voilà ! De nouveau ces yeux rouges qui emplissaient son esprit !!

- Et toi ? Comment se porte la Confrérie ? Des nouvelles de Magnéto ?

Quand Mystique lui demanda si c’était l’étudiante ou la Xmen qui demandait des nouvelles de Magnéto, elle ne put s’empêcher de sourire, et haussa les épaules :

- Tu as l’air d’avoir oublié qui m’a élevée. Mais je jouerai le jeu : ceci est une rencontre neutre. Rien de ce qui pourra être dit ici ne sera répété en un autre lieu.

Malicia se tendit lorsque sa mère approcha, malgré tout méfiante. Le pouvoir de Mystique, elle le connaissait par cœur, pour l’avoir déjà utilisé plusieurs fois. Ce n’est pas pour autant qu’elle l’appréciait, bien au contraire. Elle détestait par dessus tout cette impression de toujours trembler, lorsqu’elle changeait de forme. Elle n’avait jamais demandé si Mystique ressentait la même chose : la métamorphe aurait compris qu’elle se plaignait, et à la Confrérie, on ne se plaint pas. Tandis que sa mère parlait, Malicia ajustait ses mitaines : quelle idiote ! Pour une fois qu’elle n’avait pas pris de gants ! Du coup, elle tirait dessus pour que le moindre contact soit minime.

- Je pourrai revenir à la Confrérie… Je sais. Le fait que tu sois à sa tête me motiverai davantage. Mais tant que Magnéto ne sera pas définitivement mort, ce sera hors de question. Tu sais à quel point je peux le mépriser.

Elle avait détourné la tête, pour fixer à nouveau ses mitaines. Son majeur et son annulaire étaient complètement recouverts par le tissu noir, exactement comme… Gambit ! Encore lui ! D’un geste rageur, elle tira d’un coup sec sur ses mitaines pour les remettre correctement, et releva la tête. Contrairement à beaucoup de gens, le regard jaune de Mystique ne lui faisait pas peur, bien au contraire. Dans ce regard, elle y avait lu de la tendresse pour elle, de l’amour pour Destinée, et rarement de la colère envers elles deux. Malicia aurait donné beaucoup pour retrouver ce bonheur d’antan. Et comme si elle lisait ses pensées, Mystique s’approcha et lui passa une chaîne autour du cou. Les yeux de Malicia se voilèrent un instant, mais elle ravala ses larmes.

- Elle me manque…

Le don de Malicia s’était éveillé à l’adolescence, mais elle n’avait jamais repensé à ses parents génétiques comme à sa famille. Sa famille, sa vraie famille, elle était là, sur cette photo. Destinée avait disparu, et ça restait toujours très dur, malgré les années. Et puis, ses relations avaient changé avec Mystique, entre leurs points de vue qui finissaient irrémédiablement par diverger, et Magnéto, bien sûr… Elle avait espéré trouver une nouvelle famille d’adoption chez les Xmen, mais son pouvoir lui faisait tant peur, à présent, que rares étaient ceux qu’elle osait approcher. De l’affection, depuis l’éveil de son horrible malédiction, elle n’en avait reçu que de ses deux mères adoptives. Du haut de ses 23 ans, Malicia souffrait d’un manque d’amour évident. Ses yeux se voilèrent à nouveau, et elle décida de refermer le médaillon. Elle inspira un grand coup avant de relever la tête vers la métamorphe :

- Tu es sûre ? Tu ne vas pas regretter ton médaillon ?

Elle le serra fort dans sa main. Elle espérait que Mystique n’allait pas revenir sur sa décision.


(PS : Oh la la, je suis désolée, j'étais persuadée d'avoir répondu :/ )